Il parait qu’il faut apprendre la frustration à nos enfants.
Les psy le disent, il faut les préparer à un monde qui ne sera pas, contrairement à leur parents, à leurs pieds.
Il faut leur dire non, parce qu’un jour, une tierce personne osera l’impensable: leur faire comprendre qu’ils ne sont pas les rois du monde.
Et plus tôt ils en auront conscience, mieux ça sera.
Il parait.
Pourtant la tentation est grande, céder à leur caprices, devancer leur désirs…
Les nourrir avant qu’ils ne pleurent, les changer avant que la couche ne soit trop souillée, les coucher au premier battement de cil…
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L’aîné d’une fratrie a de la chance, il apprend la frustration plus tard que ses frères et sœurs.
Jamais Elliot n’a été interrompu au cours d’un biberon, par un « maman, j’ai fait caca! », jamais il n’a patienté dans sa couche odorante que son grand frère daigne finir sa soupe, jamais on ne lui a enlevé la girafe des mains, ou pire encore, jamais on ne lui a présenté un joli jouet, coloré et attrayant, pour finalement ne pas lui tendre en lui disant, « tu es un bébé, et ça c’est un jouet de grand garçon »…
Bref, la vie est dure pour Raphael, ou disons qu’elle est dure plus tôt que pour son frère.
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Je me souviens de la première frustration d’Elliot, tout du moins celle qui m’a vraiment marquée.
Il avait 2 ans, peut être deux ans et demi, alors que j’étais dans le salon, il va seul dans la cuisine, ouvre le frigo, prends un petit suisse, une petite cuillère dans le tiroir et revient s’asseoir à la petite table dans le salon pour manger, certain de son bon droit.
Ce n’était pas l’heure du goûter, ni celle du dessert, et bien qu’épatée par ce petit Poussin, il a fallu que je sois mère et que je lui apprenne la frustration, et que je lui retire ce petit suisse qu’il n’avait pas demandé, ni d’ailleurs le droit de manger hors des repas.
Jusqu’à présent la seule limite à son pouvoir absolu, était son jeune age et ses capacités motrices réduites.
Il est tombé de haut et ça nous a brisé le cœur, à lui comme à moi.
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La frustration est donc nécessaire, mais parfois, la vie est trop injuste.
Snif.
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Aujourd’hui, à l’aquarium que nous avons visité, nous avons acheté un petit Némo, en plastique avec une queue qui s’agite quand on tourne la molette, depuis 15h30, Elliot attend l’heure du bain.
18h, le bain coule, Elliot court chercher son poisson, ce poisson qu’il a soigné tout l’après midi, qu’il a couché dans le transat, qu’il a promené sur son bateau coussin…
Enfin, il va nager…
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Mais le destin en a décidé autrement, Némo glisse, s’échappe et fini sa course par terre, la chute a été mauvaise, la queue est cassée.
Némo ne nagera pas, jamais.
Elliot a pleuré, nous parents, nous n’en étions pas loin non plus…
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J’aurais fait n’importe quoi pour sauver Némo, pour épargner à mon Poussin, cette fichue et malhonnête frustration, j’aurais vendu mon exemplaire de « tout ce joue avant 6 ans » pour que mon fils ne connaisse pas cette frustration la…
Dont il s’est remis en 1 minute, quand il a constaté que Némo flottait malgré tout et qu’en plus il tenait dans la calle du bateau Playmobile…